L’interne à l’hôpital, ce maillon fort

Cette semaine, c’est remplacement d’internes dans les hôpitaux car tous changent de stage en même temps. J’imagine très bien la première semaine d’un nouvel interne dans un service. Ce médecin junior qui enchaine les internats de 6 mois pendant 4 ans doit à chaque fois se familiariser avec tout, pour ensuite gagner la confiance  de ses chefs.

L’article paru dans le JDD dimanche retraçant la première semaine d’un interne en hôpital donnait un coup de zoom sur cette « profession ». J’y ai découvert par exemple que le mouvement des internes soutient que « face au progrès de la cardiologie, il faudrait cinq ans d’études pratiques, et non quatre« . Incroyable ! Avez-vous jamais vu des étudiants réclamer une année d’étude en plus ?

Quant à moi je me souviens d’Aurélien, l’interne du service Hématologie à la Pitié Salpêtrière. A 28 ans – l’âge de mon fils – il se destine à la médecine interne (genre Dr House, le cador du diagnostic). Une spécialité qui suppose de connaître tout le corps de A à Z, et qui va l’obliger à faire 2 ans de plus d’internat. Déjà médecin chevronné, c’est lui qui a fait pratiquement chaque jour mon examen clinique et rédigé les prescriptions – les chefs de service ne se montrant que de manière hebdomadaire ou si urgences.

Je suis retournée dans le service cette semaine. Aurélien était donc parti vers son nouvel internat. Snif. Il va me manquer. Il a été pendant mes longues semaines d’hospitalisation de greffe un maillon ultra-fort dans l’accompagnement de la maladie. Explications, interprétation, discussion constituaient mon amarre. Une bouée de réassurance ultra importante dans ce bout de chemin qu’est l’allogreffe.

Il faut dire que j’ai toujours bien aimé les internes. Avec un grand-père chirurgien et un père chirurgien, il en gravitait toujours un ou deux autour de la famille. Certains sont même venus déjeuner le dimanche. Nous les aimions bien car c’étaient des gens à la fois cash et bons vivants. Jeunes et gais aussi. Mais je ne pouvais m’imaginer à quel point leur quotidien était si proche du malade.

Rires et douceurs à l’hôpital

4 semaines aujourd’hui que je suis à l’hôpital… hier toutes les perfusions ont été retirées, j’ai pu sortir de la chambre pour la première fois, plus reliée à ce fil de 4 mètres qui me permettait juste d’atteindre la douche, le vélo et regarder par la fenêtre.

J’espère sortir bientôt et que cette longue hospitalisation sera la dernière. Même si les internes, infirmières et aides soignantes sont adorables, et même si quelque fois on a bien ri !

Les malheurs de Sophie

J’ai toujours été plutôt maladroite et tête en l’air. Il m’est arrivée depuis l’enfance pas mal de situations cocasses : j’ai redescendu une partie d’un télésiège pendue par un bâton de ski, je me suis prise un poteau dans la rue, un pot de fleur est tombé dans ma voiture décapotable, etc… Evidemment, cette petite malédiction m’a suivie au cours de mes 3 hospitalisations :

  • j’ai failli mettre le feu avec une résistance apportée pour me faire du thé quand j’étais à René Huguenin. Juste oublié qu’elle était encore branchée quand j’ai re-appuyé sur l’interrupteur de la prise multiple quelques temps après. C’était 5 mn avant la grande visite du jeudi. Grosse fumée dans la chambre : je les ai obligés à ouvrir la fenêtre… hi, hi, hi. Je me suis aussi fait une réputation à l’étage : surveiller cette patiente !
  • nos lits montent et descendent pour permettre aux infirmières de faire les soins. Le mien est resté bloqué en haut pendant 3 heures environ. Personne n’arrivait à le faire descendre. Il fallait demander à quelqu’un de m’aider à sauter si besoin d’aller dans la salle de bain.
  • à l’AP-HP, nous sommes des cas d’école pour nombre d’étudiants et stagiaires qui viennent faire leur expérience avec leur prof spécialiste : ce fut notamment le cas quand le dermatologue est venu inspecter mon rash cutané. A ma droite, le médecin dermatologue, à ma gauche sa stagiaire. Il lui pose plein de questions sur l’examen clinique à faire. A un moment donné la stagiaire me dit : « tirez la langue et dites A » et le dermatologue de corriger à ma droite « non, on ne demande pas les 2 en même temps « . Je pars d’un énorme éclat de rire : « je fais quoi alors ??? »
  • un soir, après une transfusion sanguine qui avait déjà mis 2 heures à passer, la lumière du néon au dessus de ma tête est restée bloquée. L’équipe de nuit pas plus que moi n’arrivons l’éteindre : j’ai essayé de dormir avec un bandeau de fortune sur les yeux qui glissait tout le temps, je ne pouvais pas bien respirer. Nuit infernale.

Massage en chambre protégée

Je ne remercierai jamais assez cette association CEW qui envoie des esthéticiennes dans les hôpitaux pour nous apporter du bien-être. C’est à René Huguenin que j’ai fait la connaissance de Corinne, entrée dans ma chambre avec masque-tablier-gants et qui m’a massée pendant 40 minutes avec la seule pommade autorisée en chambre stérile : le dexeryl. Elle est revenue chaque semaine remettre mon corps en harmonie. Me donner de la douceur, dénouer mes épaules et muscles endoloris par la position allongée et les nuits en chien de fusil bloqué côté gauche pour ne pas obstruer le cathéter à droite. Le tout en musique. « Vous avez dû être chat dans une vie antérieure ». Ai-je vraiment ronronné ???

Malheureusement, l’association ne vient pas ici à Pitié-Salpêtrière.

Ode aux infirmier(e)s

Ca n’a rien d’orignal de dire que le métier de soignant – infirmier, infirmière, aide-soignant(e) etc.. ne peut se faire sans vocation. Que ces gens-là sont en or et qu’ils sont payés des cacahuètes.

Mais quand on vit au quotidien cette sollicitude, cette bienveillance et ces gestes à la fois doux et efficaces ; on ne peut que les chérir. D’où cette ode qui ne se veut pas lyrique mais reconnaissante.

Audrey, Béatrice, Isabelle, Fanny, Pauline, Paul et les autres.

Merci pour vos sourires, votre professionnalisme et vos encouragements.

Vous êtes celles et ceux qui accompagnez nos traitements à l’hôpital et les font réussir. Du changement de pansement à la prise de sang en passant par la coordination du parcours de santé, vous assurez sérieux.

Vous nous rassurez aussi et avez la tâche ô combien importante de surveiller l’état général du patient.

Vous êtes l’agent de liaison avec les médecins, prolongez leurs explications et échangez avec nos familles et visiteurs.

Vous êtes toujours là en quelques minutes. De jour comme de nuit.

Certains d’entre vous sont bavards, et c’est très bien. D’autres sont réservés, et c’est bien aussi. Vous êtes tous discrets quand il le faut.

Merci enfin pour votre convivialité et nos éclats de rire, pour vous être parfois confiés et pour avoir accueilli mes demandes, mes plaintes, mes vannes avec compréhension et sérénité.

Sans vous, et sans nos proches qui nous visitent – la vie à l’hôpital serait probablement un enfer 🙁

1er jour de printemps. J-7 greffe

Enfin le printemps est là.
Enfin, me voilà hospitalisée à la Pitié-Salpêtrière pour l’allogreffe, cette étape importante sur le chemin de la guérison.

J-7 car le Jour 1 de cette étape sera la transfusion de moelle osseuse. Soit 6 jours après une cure de chimiothérapie + anticorps qui rendront mon organisme capable de la recevoir.

Cette fois-ci, ma chambre d’hôpital est plus petite mais tout aussi confortable. J’ai de la chance de ne pas être dans une bulle absolue : au cours de mes prochaines 4 semaines, je vais pouvoir me déplacer dans ces 15m2, continuer mon vélo et faire mes ablutions.

Femme en vitrine

Les visites seront possibles aussi. Soit au travers de la vitre qui donne sur un couloir qui donne sur une fenêtre. Soit à l’intérieur de ma chambre, mais habillé en agent anti-infection comme dans les films. Ca va être drôle cette expérience de l’échange au travers d’une vitre. Comme en prison disent les premiers. Comme à Amsterdam en disent d’autres…. où les corps des femmes s’exposent aux passants. Je vais peut-être mettre des dessous noirs et rouges 🙂

Merci Internet

Grâce au mobile 4G et au wifi, cet isolement relatif sera bien plus plaisant qu’il ne l’était avant l’ère digitale. Avec toutes ces fenêtres sur le monde, les proches et les potes, on est quand même moins tributaire de la seule TV avec ses programmes de retraités qui passent à longueur de journée.
Côté lecture, je suis parée avec mon Kindle où je peux télécharger un nouveau bouquin en l’espace de quelques secondes.

Bref, je suis prête pour ce combat. Plein de bonnes munitions avec moi, et la certitude d’un entourage présent. Me voilà les sens ouverts à la découverte de nouveaux chakras 🙂

P.S. Il y a quelques jours, l’Agence de la Biomédecine organisait les journées du don de moelle osseuse. Reportage LCI à regarder ici si ça vous intéresse. Et si vous êtes jeune – entre 20 et 40 ans – pensez à vous inscrire à la banque de don.

P.P.S. J’ai finalement été hospitalisée dans le secteur protégé et non stérile. Donc grande fenêtre donnant sur des arbres et vraie salles de bain. La chance est avec moi 🙂

Chambre stérile : room sweet room

Les chimiothérapies pour les leucémies et autres maladies du sang n’ont rien à voir avec celles des autres cancers : on est hospitalisé plusieurs semaines dans des chambres stériles ou dites « protégées », tandis que les perfusions attaquent votre moelle au bazouka pour tuer les cellules souches défectueuses.

Un traitement « destop » qui tue aussi les bonnes cellules et vous laisse en aplasie pendant quelques semaines, le temps de faire naitre de nouvelles cellules qui vont fabriquer les plaquettes et globules blancs et rouges.

Autant récréer un « room sweet room » pour occuper le temps et se sentir le mieux possible… la vie est trop courte pour la vivre triste et inconfortable. Voici la liste de ce que j’y ai apporté pour être le mieux possible:

  • coussin et oreiller (je ne sais pas vous, mais les oreillers en plastic sous le drap ça fait transpirer)
  • ordinateur (s’il y a du wifi, sinon, apporter un domino orange ou autre…) pour regarder des films ou des séries
  • musique (j’avais la chance d’avoir la mini enceinte bose connectée à mon iPhone – encore mille mercis à mon frère Arnaud)
  • mini-bouilloire + mug avec votre thé ou café préféré
  • prise multiple pour brancher le tout
  • bouquins ou encore mieux tablette (kindle ou autre) pour la recharger avec de nouveaux livres quand vous serez en stérile sans pouvoir rien accepter venant de l’intérieur
  • pommade rosa pour les lèvres qui se dessèchent vite dans cet univers confiné
  • chemises de nuit boutonnées de haut en bas pour passer facilement la perfusion
  • tenues pour la journée : j’ai adopté les chemises larges et boutonnées avec caleçons ou pantalons larges
  • sac pour linge sale
  • pas besoins de serviettes de toilette ni gants : ils sont donnés par l’hôpital et changés chaque jour pour éviter les microbes

L’équipe médicale vous verra débarquer avec de gros yeux…  pour ma part, lors de mon dernier séjour, j’ai tout mis dans une grosse valise à roulette 🙂

Photo de ma chambre spacieuse à l’hôpital :